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Cet homme n’avait rien d’extraordinaire, il travaillait comme ingénieur dans une récente usine qui venait de s’implanter pas loin de la petite ville qu’il habitait. Il était marié à une somptueuse jeune femme et tous deux s’aimaient éperdument. De leur amour naquit, il y a de cela quelques années, un merveilleux et adorable petit garçon.
Il avait un visage innocent et ses grands yeux bleus fixaient tout ce qui bougeait. Ses parents étaient vraiment fiers et heureux d’avoir eu un si bel enfant. Tout semblait promettre à cette famille un joyeux avenir. John, l’ingénieur, était l’homme le plus comblé au monde. Tous les hommes de la ville en étaient envieux.
Mais un jour, survint un triste et sanglant accident à l’usine où cet heureux père de famille travaillait.
Les pertes humaines s’élevaient une dizaine de morts et bien une vingtaine de blessés. L’accident était apparemment dû à l’explosion d’une turbine. John fut compté parmi les blessés et s’en était sortit avec un léger traumatisme crânien.
La lésion se situait à la base du cerveau antérieur, une zone où quelques centaines de neurones cachés suffisent à nous précipiter dans les bras de Morphée. Cependant, John ne semblait souffrir d’aucuns troubles du sommeil. Si ce n’était qu’il parvenait à entrer dans les rêves de sa femme. Ceci l’amusait, et comme il ne voulait en rien le changer, il n’en fit part à personne.
Mais une chose l’intriguait, pourquoi ne parvenait-il qu’à pénétrer dans les rêves de sa femme. Etait-ce par qu’il était près d’elle ? Il n’en savait rien.
C’est pourquoi il décida d’essayer sur une autre personne. Il songea tout de suite à son fils qui avait déjà une dizaine d’année. Il attendit un moment pendant la nuit, et, une fois qu’il fut sur que son enfant s’était endormi, alla dans sa chambre et s’assit sur la chaise près de son lit.
Il se concentra, patiemment, quand soudain son esprit fut plongé dans les rêves de son fils. Et ce qu’il découvrit l’effraya. Il tomba dans une scène sanglante, où John et sa femme étaient les victimes et où leur fils était le bourreau. Cette scène était macabre et se déroulait dans la chambre à coucher des parents. Ils dormaient, et leur fils, après être passé par le vestibule pour s’armer d’un marteau, poussait délicatement la porte de la chambre à coucher. Puis il s’approcha innocemment du lit, du côté où sommeillait sa mère, la pièce n’était éclairée que par la lumière du vestibule passant par l’entrebâillement de la porte de la chambre ; alors John vit l’ombre du bras de son petit chérubin brandissant vigoureusement le marteau comme pour lui donner de l’élan.
Ce rêve était d’un effroyable réalisme, chaque coup que portait l’enfant sur sa mère était accompagné de bruits de craquements d’os de hurlements déchirants, le lit et le sol étaient parsemés d’éclaboussures de sang et de débris de chair. Et John se vit lui-même assistant pétrifié à ce décor funèbre et avant qu’il ait eu le temps de réagir, son fils se jetait sur lui pour l’accabler de coups brutaux.
John se pressa alors de sortir de ce rêve cauchemardesque et retourna dans sa chambre en s’assurant de bien fermer à double-tour la porte.
Et toute la nuit durant, il resta stoïque dans l’obscurité, songeant à ce qu’il pouvait bien faire pour empêcher cela. Il ne pouvait certainement pas tuer son fils, même si cela aurait peut-être été la meilleure chose à faire. Il ne pouvait pas l’enfermer non plus et d’ailleurs qui aurait cru à son histoire ?
Ainsi continua-t-il à vivre sa si « parfaite » petite vie avec sa si « paisible » petite famille, s’assurant que chaque soir il avait bien verrouillé la porte de sa chambre et priant que le sinistre rêve de son fils ne se réalise jamais…
